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Emilie de Rodat Villefranche-de-Rouergue
Emilie de Rodat

Émilie de Rodat (1787-1852) est la fondatrice de la congrégation des sœurs de la Sainte-Famille, qui a aujourd’hui encore son siège à Villefranche-de-Rouergue.

Cette organisation compte des centaines de membres et est présente dans plus de 10 pays dont l’Angleterre, l’Irlande, le Brésil, l’Espagne, le Liban, la Bolivie, la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou encore les Philippines.

Emilie de Rodat a connu un destin extraordinaire, qui lui a valu d’être béatifiée en 1940 et canonisée en 1950 : c’est donc une “sainte”.

Emilie de Rodat : l’institutrice des pauvres

Emilie de Rodat naît en 1787 au château de Druelle (près de Rodez) dans une vieille famille bourgeoise. Elle est l’aînée de Jean-Louis de Rodat et d’Henriette de Pomayrols.

Vers 1801, Emilie rejoint sa grand-mère Agathe de Pomayrols à Villefranche-de-Rouergue, dans une communauté installée dans la Maison Saint-Cyr, place de la Fontaine. Cette communauté regroupe des religieuses dont les couvents ont disparu sous la Révolution.

En 1803, à 16 ans, Emilie décide de retourner au château de Druelle où elle s’ouvre à la foi en compagnie de sa sœur Eléonore. Abandonnant peu à peu son style de vie bourgeois, elle se met à visiter les pauvres et les malades.

En 1805, elle se réinstalle à la Maison Saint-Cyr. A partir de 1809, elle vit plusieurs expériences d’engagement religieux à Figeac, Cahors et Moissac, sans succès.

En 1815, elle a une révélation : elle sera l’institutrice des pauvres. Elle commence à enseigner dans sa chambre, accueillant de plus en plus de défavorisés.

Un jour, je rencontrais plusieurs femmes chez une malade : elles parlaient de leurs pauvres enfants qui, disaient-elles, croupissaient dans une ignorance grossière et dans l’oubli de Dieu parce qu’elles n’avaient pas de moyens pour les faire instruire. “Ah, disaient ces pauvres femmes, avant la Révolution, les Ursulines enseignaient gratuitement : nous-mêmes avons eu le bonheur d’être instruites par elles.”

Ces paroles furent comme un trait qui vint percer mon âme. Je leur dis de m’envoyer leurs filles ; que je me chargeais moi-même de les instruire et je promis alors à Dieu, dans mon coeur, de faire tout ce qui dépendrait de moi pour fonder, dans Villefranche, un établissement destiné à l’enseignement des filles pauvres.

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Maison Alric, place Bernard-Lhez

Le 30 avril 1816, Emilie s’installe dans la maison Alric (place Bernard-Lhez) pour accueillir plus d’élèves. Là, elle fonde, le 3 mai 1816, la Congrégation de la Sainte-Famille avec trois de ses amies : Marie Boutaric, Eléonore Dutriac et Ursule Delbreil.

A cette occasion, Emilie reçoit le soutien du vicaire général du diocèse de Rodez, Antoine Marty.

Les débuts de la congrégation des sœurs de la Sainte-Famille

La congrégation, dont Emilie est la Mère Supérieure, se consacre à l’instruction des pauvres, à l’aide aux orphelins et aux soins à domicile. Elle connaît un succès fulgurant et s’agrandit mois après mois.

En 1817, la congrégation acquiert l’ancien couvent des Cordeliers, où elle installe son siège, toujours actif à ce jour. Cet imposant ensemble immobilier s’étend sur la partie ouest de la bastide de Villefranche-de-Rouergue.

En 1822, suite à une demande, Émilie fonde à Aubin la première communauté hors Villefranche. Plusieurs dizaines de communautés suivront, écoles maternelles et primaires, structures d’accueil et autres refuges.

En 1827, Émilie lègue tous ses biens à la congrégation.

En 1834, en plein développement des houillères de Decazeville, Emilie fonde la première communauté non cloîtrée à Vialarels, en vue d’instruire les enfants des familles de mineurs.

La même année, elle fonde la première école en milieu rural à Lassouts, dans le très pauvre nord-Aveyron, suite à un leg de trois maisons.

En 1843, les sœurs de la congrégation sont confrontées à la misère des femmes en perdition, prostituées, voleuses ou ex-prisonnières. Emilie décide d’ouvrir un refuge pour ces femmes à Villefranche.

L’éducation selon Emilie de Rodat

Au sein de la congrégation, les sœurs vivent dans une grande pauvreté, toutes leurs ressources servant prioritairement à satisfaire les besoins des enfants et des malades.

Emilie met un point d’honneur à traiter tous les enfants, même les plus difficiles, avec affection.

C’était toujours par la douceur et l’insinuation que je les conduisais, ne les grondant jamais. Je tenais à ce que toutes crussent que je les aimais également, aussi ne passais-je pas de jour sans donner à chacune une marque d’affection, un coup d’oeil, un sourire gracieux, une parole tendre. Je faisais en sorte que chacune pût se dire : ma Maîtresse a pensé à moi aujourd’hui.

Emilie de Rodat n’a jamais développé de doctrine éducative, préférant une approche pragmatique, toujours adaptée aux circonstances.

Lorsqu’elle est dépassée par le nombre des enfants accueillis, elle se sert des unes pour enseigner aux autres.

L’école de Villefranche accueille aussi des élèves de milieu aisé dans des classes séparées, ce qui sert à financer l’éducation des plus pauvres.

A Aubin, les sœurs font tout ce qui est en leur pouvoir pour attirer et faire revenir les filles pauvres, allant jusqu’à leur distribuer des prunes ou de la salade.

Le développement de la congrégation après la mort d’Emilie de Rodat

Émilie de Rodat meurt à Villefranche-de-Rouergue le 19 septembre 1852. A cette date, pas moins de 41 communautés sont actives.

La congrégation continue de s’étendre tout au long de la seconde moitié du XIXème siècle, répondant aux demandes de création d’écoles aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain, dans l’Aveyron, le Tarn-et-Garonne, le Lot ou en région parisienne (par exemple à Wissous).

Certains écoles deviennent communales, et la rémunération des enseignantes est prise en charge par les collectivités, ce qui permet à l’institution de mieux accueillir les plus pauvres. Le rôle de la congrégation est reconnu par le régime du Second Empire.

En 1862, la congrégation fonde le Refuge du Bon pasteur à Rodez. Celui de Millau sera fondé en 1896.

En 1892, la congrégation prend en charge un orphelinat agricole en Gironde.

A la demande et avec l’aide des Cibiel, riche famille de Villefranche, la congrégation prend la direction de l’hospice de Rulhe (à proximité immédiate de Villefranche-de-Rouergue) et fonde un asile de vieillards à Rueil-Malmaison.

La congrégation organise aussi l’accueil des blessés de guerre, notamment en 1870 et durant la Première guerre mondiale, où 86 infirmières interviennent auprès des victimes.

En 1902, à son apogée, la congrégation compte 199 communautés.

La congrégation de la Sainte-Famille au XXème siècle

Au début du XXème siècle, la congrégation est frappée de plein fouet par les lois anti-congrégationnistes. Les trois quarts des communautés ferment. Seules 16 réussiront à se transformer en écoles libres. Les sources de revenus se tarissent ; les religieuses sont tentées de se reconvertir ou de partir à l’étranger.

Amputée de son action première et principale, à savoir l’instruction des jeunes filles, la congrégation de la Sainte-Famille va dès lors se concentrer sur les oeuvres caritatives et l’implantation à l’étranger.

La première implantation se fait au Liban en 1894, suite au retrait d’une communauté d’enseignants français.

En 1902, la congrégation envoie sept religieuses au Brésil pour répondre à la demande d’un industriel préoccupé par la situation sociale de ses ouvriers. Aujourd’hui dans ce pays, la congrégation soutient les femmes et les enfants victimes de violences.

Diverses communautés seront par la suite créées en Suisse, en Italie, en Angleterre, en Espagne ou encore en Belgique.

En 1957, le pape Pie XII lance un appel en faveur des missions à l’étranger : la congrégation s’implantera alors en Bolivie, en Côte d’Ivoire, et plus tard au Sénégal.

En 2004, la congrégation crée un foyer aux Philippines destiné à accueillir les fillettes abandonnées. Là-bas, la communauté oeuvre aussi pour la formation professionnelle et la construction de maisons modestes.

En France, la congrégation change de forme et s’adapte aux changements de la société. En 1968, la clôture est supprimée et la tenue est simplifiée. La direction s’internationalise. A partir de 1993, la congrégation s’ouvre aux laïcs.

Le sauvetage d’enfants juifs durant l’Occupation

Durant la Seconde guerre mondiale, les communautés de la Sainte-Famille agissent en faveur des réfugiés de guerre. Un engagement qui ira jusqu’à cacher et héberger des enfants juifs dans les communautés de Villefranche (hospice de Rulhe), Rodez et Camarès.

Sur le site de Rulhe, les sœurs Antoinette Masserey et sa cousine Jeanne-Françoise Zufferey, d’origine suisse, accueillent près d’une vingtaine de jeunes filles juives envoyées par l’Œuvre de secours aux enfants (OSE) sous des noms d’emprunt, ainsi que des familles juives.

Ceci vaudra à ces deux sœurs d’être inscrites sur la liste des Justes parmi les Nations, au même titre que la Villefranchoise Eva Pourcel.

Cliquez ici pour lire l’histoire complète des enfants juifs cachés à Villefranche.

La chapelle Sainte-Emilie-de-Rodat de Villefranche-de-Rouergue

Suite à la canonisation d’Emilie de Rodat le 23 avril 1950, une chapelle est érigée rue du Sergent-Bories à Villefranche-de-Rouergue.

Cette chapelle abrite le tombeau de la sainte, dans la crypte.

Lire notre article sur la chapelle Sainte-Emilie-de-Rodat et sa crypte.

Voir aussi le site internet de la congrégation de la Sainte-Famille.

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