De 1951 à 1958, Villefranche a accueilli sept courses de motos sur un circuit classé au rang international.
Long de 8,952 km, le circuit débutait près de la place du Saint-Jean, remontait les allées Aristide-Briand, continuait vers le hameau de Farrou et prenait à droite pour redescendre la route basse de Farrou.
L’itinéraire empruntait des routes départementales fermées et aménagées pour l’occasion.
Retour sur ces grands évènements sportifs.
La genèse et la première édition (1951).
Le circuit a été créé par le Moto Club Rouergat sous l’impulsion de son président, le coureur motocycliste Roland Gauch, originaire de Saint-Salvadou, deux fois vice-champion de France (1952, 1956).
Le Moto Club Rouergat avait été créé en 1947 sous l’impulsion d’un photographe à la retraite, ancien motard de la guerre 1914-1918 : Camille Rivière.
En 1949, Roland Gauch débute avec sa Triumph sur les circuits de vitesse ; il sème le virus qui conduira à la création du circuit de Farrou.
En 1950, sous la présidence de J-B Orcibal, le circuit de Farrou est créé mais doit se contenter d’une épreuve de régularité, faute d’homologation pour les courses de vitesse.
En 1951, Roland Gauch, qui s’est déjà taillé un nom sur les circuits français, prend la présidence du Moto Club et obtient l’autorisation d’organiser les courses de vitesse.
La première édition se déroule donc le 19 août 1951, avec trois courses correspondant aux trois catégories 175 cm3, 350 cm3 et 500 cm3.
On note déjà la présence de coureurs de premier ordre, tels Collot, Houel, Besse, Post, Gaury ou Soulet. Roland Gauch, blessé, suit la course depuis les tribunes.
La course se déroule bien mais la sécurisation du circuit (quelques bottes de paille amenées par un paysan du coin) relève de l’amateurisme. Financièrement, le Moto Club ne s’y retrouve pas, même si le public repart ravi.
- Vainqueur 175 cm3 : Gaston Gaury (Morini)
- Vainqueur 350 cm3 : Georges Houel (Velocette)
- Vainqueur 500 cm3 : Jacques Collot (Gilera)
L’édition du 17 août 1952.
Le Moto Club Rouergat aborde cette deuxième édition mieux organisé. Les bénévoles sont à l’oeuvre pour préparer le circuit. Un comité indépendant d’organisation du circuit est créé, avec à sa tête Maître Sinègre-David.
Les courses sont belles et disputées. Roland Gauch concourt. Trois jeunes villefranchois finissent classés : Bonnal, Boyer et Orcibal.
Cette deuxième édition est une réussite et des articles commencent à paraître dans la presse spécialisée.
- Vainqueur 175 cm3 : Gaston Gaury (Morini)
- Vainqueur 350 cm3 : Jacques Collot (Norton)
- Vainqueur 500 cm3 : Pierre Monneret (Gilera)
L’édition du 16 août 1953 : une épreuve devenue internationale.
Une nouvelle étape est franchie en 1953 avec le classement du circuit comme épreuve internationale ; il compte aussi pour le championnat de France.
La municipalité (un certain Robert Fabre vient d’être élu maire de Villefranche) accorde une avance de trésorerie importante, qui sera remboursée dès le lendemain de la course.
Le Moto Club Rouergat détecte les talents dans le monde entier et les invite à concourir à Villefranche, à l’image du néo-zélandais Leo Simpson (vainqueur des catégories 350 cm3 et 500 cm3) ou des frères Hinton.
Le record du tour s’améliore, passant de 120 à 125 km/h.
- Vainqueur 175 cm3 : Georges Burggraf (MV Agusta)
- Vainqueur 350 cm3 : Leo Simpson (AJS)
- Vainqueur 500 cm3 : Leo Simpson (Matchless)
L’édition du 8 août 1954.
L’édition 1954 sera remarquable à tous les niveaux : organisation, pilotes et course. Les pilotes anglais, australiens, néo-zélandais, belges et irlandais affluent.
Le temps est incertain et la malchance accable Leo Simpson, la coqueluche des Villefranchois, laissant la victoire aux Français. En effet, Leo Simpson connaît des problèmes de boîte en 350 cm3 et grille une soupape en 500 cm3.
Jacques Collot triomphe par deux fois sur un circuit mouillé ; il conforte sa place en tête du championnat de France.
- Vainqueur 175 cm3 : André Bouin (Peugeot)
- Vainqueur 350 cm3 : Jacques Collot (Norton)
- Vainqueur 500 cm3 : Jacques Collot (Norton)
L’édition 1955 (annulée).
À la suite du terrible accident qui a eu lieu le 11 juin sur le circuit des 24 Heures du Mans, toutes les compétitions sont annulées, y compris celle de Villefranche-de-Rouergue.
L’édition du 5 août 1956 : la mort d’Eddy Grant.
L’édition 1956 est marquée par l’arrivée de nouveaux règlements de sécurité, bien plus stricts qu’auparavant. Le prix des assurances explose. Les bénévoles redoublent d’efforts pour mettre le circuit aux normes.
Hélas, cette édition ne verra pas revenir le néo-zélandais Leo Simpson, car l’enfant chéri des Villefranchois s’est tué le 20 octobre 1954 dans son pays d’origine en faisant du hors-bord.
En 175 cm3, une lutte fratricide oppose les deux Villefranchois Bonnal et Boyer. Dans la dernière boucle, Bonnal bat le record du tour et finit vainqueur.
Au départ de la catégorie 350 cm3, Hinton, Grant et Collot sont dans un mouchoir de poche. A la fin du deuxième tour, Eddy Grant (Afrique du sud) sort de la route en attaquant Hinton et va s’écraser contre le mur de la voie ferrée.
A 31 ans, Edwin Martin Grant meurt sur le coup, d’une fracture au crâne. Aujourd’hui encore, une plaque est visible à l’endroit de l’accident sur la route basse de Farrou, un peu avant le panneau d’entrée en agglomération.
La course des 500 cm3, très disputée, est marquée par la chute de Hinton, qui parvient toutefois à remonter sur sa moto et à terminer la course, sous les acclamations nourries du public.
- Vainqueur 175 cm3 : Jacques Bonnal (Morini)
- Vainqueur 350 cm3 : Eric Hinton (Norton)
- Vainqueur 500 cm3 : Pierre Monneret (Gilera)
L’édition du 4 août 1957.
Cette édition ne connaît pas le succès d’affluence attendu, du fait d’un violent orage qui s’est abattu sur Villefranche-de-Rouergue vers 13h30.
Nouveauté : les catégories 175 et 500 cm3 se disputent désormais en deux manches, avec un classement général par addition des temps.
En 175 cm3, Piscaglia s’accroche dans un virage de la route basse avec Fiquiere. Les vertèbres cervicales fracturées, il est évacué sur Toulouse : il mourra le 4 novembre 1957.
La course des 350 cm3 va être marquée par la lutte entre McCutcheon, Kassner et Collot ; le premier finira vainqueur.
Les 500 cm3 se courent en deux manches de 7 tours. Hinton et Collot se livrent une bataille acharnée sur le final ; Hinton ressort vainqueur.
- Vainqueur 125 cm3 : Jacques Lesage (Ducati)
- Vainqueur 175 cm3 : Jacky Onda (FB Mondial)
- Vainqueur 350 cm3 : Noel McCutcheon (Norton)
- Vainqueur 500 cm3 : Eric Hinton (Norton)
L’édition du 3 août 1958.
Cette édition marque la fin mais aussi l’apothéose de l’aventure du circuit moto de Villefranche-de-Rouergue.
Trois futurs champions du monde participent à cette édition : Redman, Hocking et Phillis.
Les 175 cm3 sont sorties du programme au profit des 500 Sport, une nouvelle catégorie aux côtés des 500 Inter.
Les frères Hinton assurent le spectacle de bout en bout. Harry Hinton bat le record absolu du circuit avec 131,5 km/h.
- Vainqueur 350 cm3 : Hinton
- Vainqueur 500 cm3 : Maubert
- Vainqueur 500 cm3 Inter : Anderson
Au soir du 3 août 1958, nul ne se doute encore qu’il n’y aura plus de course de moto à Villefranche-de-Rouergue. L’équipe des bénévoles est fatiguée et affaiblie du fait du départ de nombreux membres, mutés dans d’autres villes. Le Comité d’organisation votera, quelques temps après, sa propre dissolution.
Il restera le souvenir d’incroyables courses et de duels épiques dans une ambiance parfois survoltée, sur un circuit étonnant mais dangereux, qui de toute manière aurait été interdit quelques années plus tard.
Quelques photos amateur de l’édition 1952.
Les rétrospectives des années 1990.
Dans les années 1990, le Moto-Club Rouergat et La Rétrocyclette (Saint-Salvadou) organisent plusieurs rétrospectives : composition d’une grille de départ des années 1950 puis démonstrations de course.
Ci-dessous quelques photos de la rétrospective de 1997 :
Merci à Thierry Poirier qui a fourni les éléments et photos ayant permis de composer cet article.
Photos 1952 – 1997 © Thierry Poirier