Le projet municipal de construire des Bains-Douches à Villefranche remonte à 1932. A cette époque, les municipalités se préoccupent de plus en plus de l’hygiène des plus démunis.
L’emplacement de ce futur équipement est étudié et discuté à plusieurs reprises. Plusieurs lieux sont pressentis : rue du Chapitre, Promenade du Guiraudet, Boulevard de la Douve (actuel Boulevard Charles de Gaulle), Promenade du Petit Languedoc, Quai du Temple ou encore Promenade du Saint-Jean.
C’est finalement le Quai du Temple qui est retenu, en bordure de l’Aveyron. Mais après le lancement du concours d’architectes, le débat sur l’emplacement est relancé, et on revient à l’idée de la promenade Saint-Jean.
Sept architectes répondent au concours. En 1934, le conseil municipal décide finalement de faire appel à son architecte municipal Achille Masini.
La municipalité se positionne aussi sur le principe d’une mise en adjudication publique afin de favoriser “les intérêts des entrepreneurs et ouvriers villefranchois durement atteints par le chômage” : nous sommes en pleine crise des années 1930.
Les travaux et l’ouverture au public.
Les travaux ne commencent réellement qu’en 1936-1937 et les Bains-Douches ouvrent au public en 1939.
L’architecte Achille Masini a souhaité que ce bâtiment public se distingue par un style représentatif de son époque : l’Art Déco. Ce style se caractérise par des formes géométriques épurées. Sur le fronton, l’élégant lettrage en mosaïque affiche ostensiblement la fonction de l’établissement.
L’établissement a fonctionné jusque dans les années 1990. Depuis 2001, il accueille le service de l’architecture et du patrimoine du Pays d’art et d’histoire des Bastides du Rouergue.
Achille Masini.
Achille Masini, à qui l’on doit les plans des Bains-Douches de Villefranche, est né à Montpellier le 23 juin 1882.
Il se forme auprès d’un architecte de la ville, puis travaille quatre ans à Etampes avant d’être nommé en 1906 à Villefranche, commune pour laquelle il travaillera 31 ans, d’abord comme conducteur surveillant des travaux, puis en tant qu’architecte communal.
Achille Masini meurt le 10 août 1937 à Villefranche à l’âge de 55 ans alors que les travaux de terrassement des Bains-Douches débutent à peine. C’est Léon Huc, ingénieur de l’École Nationale d’Arts et Métiers, qui terminera le chantier.
L’architecte a fortement marqué le paysage urbain de Villefranche. Outre les Bains-Douches, on lui doit d’assez nombreuses commandes publiques et privées. Il réalise notamment en 1927 l’ancien garage Citroën, situé à l’angle de la rue Bories et du Boulevard Charles de Gaulle, dont le style Art Déco et le traitement de mosaïque annoncent le programme architectural des futurs Bains-Douches (photos ci-contre).
Le décor qui orne le fronton de l’ancien garage, portait l’inscription « AUTOS », comme en témoigne une photo ancienne. Il est aujourd’hui lacunaire et occulté par un enduit peint.
C’est aux Ets Faure de Toulouse, que l’on doit le décor de mosaïques de ces deux chantiers. La façade soignée de l’ancien garage porte la signature d’Achille Masini et la date de sa construction.
Achille Masini est également l’auteur de plusieurs socles de statues commémoratives : le monument aux morts de 1870, celui de 1914-1918, ainsi que le monument dédié au poète Charles de Pomairols.
Masini a également bâti la maison du gardien de la station de traitement des eaux située dans le quartier du Tricot ainsi que plusieurs pavillons en ciment, en brique et en pierre qu’il conviendrait d’inventorier.
Dans un courrier daté de 1934 et adressé à un client, Achille Masini, conscient de son talent, se présente comme “l’auteur de presque toutes les petites villas construites à Villefranche depuis la guerre” et ajoute, peut-être afin de séduire le futur client, “quand je ne les ai pas construites, on s’est appliqué à copier mes conceptions”…
Les Bains-Douches, un établissement moderne.
Ce sont les entreprises Faustin Cousteils (maçonnerie), Les Fils de Victorin Privat (Millau, charpente et menuiseries) et G. Alcouffe (couverture) qui ont réalisé les travaux.
Le bâtiment, composé d’un pavillon central et de deux ailes, est construit sur pilotis de béton.
Les façades sont couvertes d’un décor de mosaïques bleues et orangées, de style égyptien.
La façade arrière, donnant sur l’Aveyron, est la plus spectaculaire. Elle décline des arcs en plein cintre : les arcades au niveau de la rivière, les trois portes-fenêtres sur le balcon du rez-de-chaussée et les trois baies de l’étage.
Le vaste hall d’entrée, agrémenté d’une fontaine décorative au centre, ouvre largement sur la rivière ; le bureau du gérant donne directement sur l’entrée.
Un dégagement central de chaque côté du vestibule mène à gauche à l’espace réservé aux femmes et à droite à l’espace réservé aux hommes.
Chacun des espaces de bain est composé de trois cabines de bains, trois salles de douches, un lavabo et un WC.
L’eau chaude, les éléments de robinetterie et les vasques témoignent du confort moderne.
Le sous-sol est occupé par une chaufferie, un dépôt de charbon et une buanderie. Au premier étage se trouve un appartement composé de deux chambres et d’une cuisine.
Pays d’art et d’histoire des Bastides du Rouergue
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