Evènements historiques, Histoire|

En 1628, une épidémie de peste décime les campagnes et les villes du Royaume de France. Comme en 1348 pendant la peste Noire (mais aussi en 1439, 1463, 1506, 1507 et 1558), Villefranche n’est pas épargnée.

Ce n’est qu’en 1894 qu’on comprend que la peste est due à un bacille (Yersinia pestis) et se transmet principalement par piqûre de puces, lesquelles vivent sur les rats. Lorsqu’un individu tombe malade, la transmission se fait par voie aérienne et par contact.

Les épidémies de peste ont tendance à apparaître avec la malnutrition, le manque d’hygiène et un climat plus humide et plus chaud qu’à l’accoutumée. Elles voyagent dans toute l’Europe.

La peste à Villefranche

C’est d’abord par la bouche des marchands et des voyageurs que l’on apprend l’arrivée prochaine du fléau.

La peur s’installe, les comportements deviennent irrationnels. Les testaments devant notaire se multiplient : Maître Delavernhe, notaire à Montbazens, voit arriver 11 personnes à son étude pour la seule journée du 9 octobre 1628.

Puis c’est la phase de contagion, qui précède la maladie elle-même. Enfin, les premiers symptômes apparaissent : maux de tête, fièvre, vomissements, douleurs, bubons, toux, confusion mentale, hémorragie…

Certains habitants fuient leur maison vers des contrées encore préservées, suivant le proverbe : “Pour n’avoyr de la peste le dard, Fuys tost, va loing, retourne tard”. Ils deviendront vagabonds, alors que d’autres se construiront des cabanes de fortune au milieu des vignes ou des bois, en proie à la faim et aux loups.

A l’été 1628, les bourgeois de Villefranche rassemblent leurs richesses, ferment avec soin les portes de leurs demeures et s’en vont passer l’été dans des résidences familiales, à la campagne.

Lorsque l’épidémie s’installe, un consul de Villefranche, Jean Rous, reste pour organiser l’état de siège, tandis qu’un conseil de santé est mis en place.

La ville est fermée, les ponts sont coupés et les murailles gardées par les baniers et capitaines. Les témoignages sont édifiants : “Les consuls de Villefranche doivent conserver la ville par le moïen des soldats s’estant trouvé en avoyr trente deux le soir et le lendemain n’en rester que troys et l’ung d’iceulx mallade et les autres mortz de la malladie contagieuze”.

La vie s’arrête, il n’y a plus de marchés ni de foires. La vie dans les champs est désorganisée.

Villefranche organise l’autarcie, les habitants n’ayant pas le droit de sortir de la cité. On manque de tout. Le blé est réquisitionné, les prix sont contrôlés, le rationnement est instauré. Un marché noir se crée aux portes de la ville avec la complicité des gardes.

Les charrettes remplies de cadavres circulent dans les rues. Les malades sont enfermés à la boudoumie, sorte de campement pour pestiférés en dehors des murs, à côté duquel on creuse une fosse où les “corbeaux” déversent tous les jours leurs chargements de morts.

Petit à petit, la cité sombre. On a recours à la sorcellerie. Des charlatans (désaireurs) tels Jean Buisson vendent leurs services à prix d’or pour désinfecter les demeures des plus riches, pendant que d’autres pillent les maisons.

Villefranche est livrée à elle-même.

Durand de Montlauzeur, courageux face à la pandémie

Durand de Montlauzeur, ancien consul et médecin à Villefranche, affronte avec courage l’épidémie de peste.

C’est lui qui met en place le conseil de santé composé de huit hommes nommés tous les quinze jours. Ce conseil est chargé de l’entretien, du nettoiement de la ville, ainsi que de la garde des murailles.

Dans son Manifeste de ce qui s’est passé en la maladie de la peste à Villefranche de Rouergue, Durand de Montlauzeur décrit :

Vrayement maladie aveugle parce qu’elle n’épargne personne et qu’elle est incogneue après tant d’expérience ; maladie aussi divine à cause qu’elle a tant de rapports à la justice de Dieu, que tout ce que l’on peut dire de certains de ses effets, de sa nature et de ses qualitez n’est autre sinon qu’elle est un grand fléau de Dieu, et s’il faut parler avec l’Ecriture, qu’elle vient à nous immédiatement du ciel.

En dépit des risques de contagion, Durand de Montlauzeur soigne les malades et réconforte les mourants, s’attirant la reconnaissance d’une partie de la population.

Mais parfois, le médecin est reçu par des cris et des jets de pierres. En effet, il devait porter le terrible costume des médecins de la peste, avec un faux nez rempli d’herbes aromatiques pour le préserver des humeurs pestilentielles. Botté, ganté, chapeauté, vêtu des pieds jusqu’à la tête, il parcourait ainsi les rues de la ville et effrayait les âmes sensibles. Pour certains, il était l’image de la mort.

Le médecin examine les malades à distance, sans contact. Il propose des potions aromatiques très coûteuses, préparées par les apothicaires. Il est accompagné d’un chirurgien qui lui, excise les bubons pour les vider de leur matière pestilentielle.

Villefranche, qui a perdu la moitié de sa population, aura beaucoup de mal à se remettre de la peste de 1628. Désorganisée, endettée, la ville connait aussi des rechutes pandémiques. Ce n’est qu’au bout de quelques années qu’elle retrouvera la prospérité qui fait sa renommée.

Lire aussi : Jean de Pomairols, un héros en temps de peste.

Certains des éléments ci-dessus sont tirés de :
Mouysset Sylvie, La peste de 1628 en Rouergue, Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, Tome 105, N°203, 1993.

Pour en savoir plus sur l’histoire de Villefranche :

Société des Amis de Villefranche et du Bas-Rouergue
amisvbr {@} gmail.com
www.amis-villefranche.fr
09 67 56 70 10
Permanences le mercredi de 15h00 à 17h00 à la Maison des Sociétés, place Bernard-Lhez

Voir aussi les Archives municipales

Shares

Les commentaires sont fermés.

Close Search Window
Aller au contenu principal