Histoire|

En 1552, à l’occasion d’un grand procès entre provinces, eut lieu une enquête visant à évaluer les capacités contributives de chaque territoire. Divers témoins habitués à parcourir le territoire furent entendus. Ces témoignages ont été recopiés par Jacques Bousquet, ancien archiviste de l’Aveyron ; ils donnent des indications intéressantes sur le canton de Villefranche en 1552 (époque Renaissance).

Cette description contient des détails remarquables, concernant par exemple les vêtements des bourgeois ou le travail des enfants. Villefranche apparaît comme une ville particulièrement riche, active, grouillante, rayonnante et connectée aux autres provinces du royaume.

Villefranche-de-Rouergue description renaissance

Les mines et martinets

« Audit pays même près Villefranche, y a mines d’or, argent et plomb, d’inestimable profit et revenu.

A dit avoir vu au moulin de Monsieur d’Assier à 4 lieues de Villefranche et au terroir la ville de Mur de Barrez y avoir mine d’argent et auxquelles il a été et a vu tirer desdites mines ledit argent et plomb, et quand à celui argent, le portent ceux qui le tirent à la batterie et monnaie qui est audit pays à Villefranche, et quand au plomb, s’en aident en leurs commodités et affaires et outre le distribuent aux pays étrangers, et combien que le coût soit grand de tirer desdites mines ledit plomb et argent, néanmoins en vient grande commodité tant pour l’occupation de plusieurs gens que aussi pour le profit qui y est à la vente dudit plomb et distribution de l’argent. Mines d’argent et plomb près Villefranche et Mur de Barrez, auxquelles ledit déposant a passé. (…)

Audit Rouergue même près Villefranche, Rodez, Albin et Nant y a plusieurs martinets, qui sont forges à battre cuivre pour faire chaudières, chaudrons, poêles, poêlons, conches et autres ustensiles de cuivre, dont les habitants de Rouergue font profit annuel de 60 000 écus ou plus, car fournissent desdits ustensiles les pays de Lenguedoc et toute la Guyenne où ne y a aucuns martinets et sont contraints eux pourvoir d’iceux ustensiles en Rouergue, pour raison duquel trafic Patras et Dardene marchands de Villefranche sont enrichis de 200 000 livres chacun. Grande vente de chaudrons et autres ustensiles dans les pays circumvoisins comme Auvergne, Languedoc, Quercy et autres pour raison qu’aux dits pays n’y sont aucuns martinets, sauf à Figeac. (…)

La description de Villefranche-de-Rouergue en 1552

Villefranche. Est sur la rivière de l’Aveyron, navigante de longue étendue, bon pays pour blés, vins, noix, glandages et châtaignes. Ville marchande et bien assise. L’Aveyron n’est pas navigable en ladite ville, mais seulement quand on approche à deux lieues ou trois de Montauban. Ville la plus marchande du Rouergue et plus marchande que celle de Rodez.

La cour du sénéchal y est, n’y a qu’un siège en Rouergue qui est là. Estimée des plus belles sénéchaussées de France. La cour du sénéchal contient toutes les appellations du pays de Rouergue auquel n’y a que ce seul siège présidial.

Y a sénéchal, juge mage, avocat et procureur du roi, 15 conseillers formés, grand nombre d’avocats et procureurs. Plusieurs judicatures ordinaires et les seigneurs de dehors y font tenir leurs judicatures et cours.

Les gens de pratique riches, tous vêtus de soie (et de velours). Les greffes s’afferment 10 000 livres, le sceau du sénéchal 1 500.

Bourgeois et marchands riches. Deux marchés la semaine, plusieurs foires l’an. Se vend un infini nombre de bétail chevalin et cornu.

Marché pour le moins toutes les semaines où se fait ordinairement et presque tous les jours vente et trafic de quelque bétail et autre marchandise à cause de la multitude et affluence de gens qui y viennent et abordent, tant pour plaidoyer et acheter draps et autres marchandises.

Grand nombre de marchands, bourgeois, gens d’église, artisans et de métiers qui sont estimés riches de 80 000 livres ou plus, les autres de 60, 50 et autres moins à cause de la négociation et trafic de marchandises qui se fait en ladite ville.

A dit savoir qu’il y avait marché une fois la semaine qui se tenait le samedi, et a ouï dire qu’il y en avait un autre qui se tenait le lundi. N’a pas tant estimé le revenu des foires que la négociation et trafic ordinaire qui se fait en icelle ville, combien qu’aux dites foires se vendent quelque bétail tant à corne que pied fourchu de toutes sortes et que icelles foires apportent quelques profits, mais le trafic ordinaire est principalement en draperie.

Grand trafic de laines et draps. Tous les ans ils y font 3000 pièces de drap à 15 livres pièces, montant plus de 400 000 livres. Grand fait de bonneterie, tellement que les petits enfants gagnent leur vie à tresser bonnets (n’y a petit enfant ni fille qui ne gagne sa vie).

Entre autres marchandises, une des plus commune et profitable est la draperie, de laquelle ils font grand maniement et dépêche, même avec les pays étrangers et circumvoisins et mêmement ceux des pays d’Auvergne et Quercy et d’autres lieux en font fourniture auxdits lieux.

Un des plus fructueux et profitable est la draperie se faisant en ladite ville, laquelle le dit déposant a estimé de 15 000 pièces par an, lesquelles ils font transporter en Lyonnais, au Puy et autres pays circumvoisins, lesquelles pièces l’une portant l’autre, se peut vendre raisonnablement 14 ou 15 fr…

Quantité de bonneterie, non pas autant que de draperie… Chacun des habitants jusqu’aux plus petits peuvent aisément gagner leur vie pour les diverses façons qui sont en ladite draperie et bonneterie. Jusqu’aux plus petits de 5 à 6 ans gagnent leur vie à cause de ladite marchandise.

Les marchands trafiquent en Allemagne et tous autres pays (Anglaterre, Espaigne, aux Ytallies). Riches les uns de 200 000 livres (comme sont Patras et Dardenne), et les plus bas de 25 à 30 000 livres. Les marchands trafiquent tant avec ceux du royaume que les étrangers comme d’Allemagne et d’Espagne, et mêmement au foires de Lyon, auxquelles ont négociation avec Allemands et Espagnols principalement de safran et rosette, et avec ceux du royaume de draps de laine.

La monnaie

Y a forge de monnaie tant d’or que d’argent, mines d’argent, martinets pour la mine et fonte de cuivres et métaux, officiers de monnaie.

Le profit en revient aux habitants de 15 000 livres par an (10 000 livres au maître des martinets, sans y comprendre le profit des officiers de la monnaie). (…)

Ne sait si on y marque les pièces d’or. Près ladite ville y a mine de plomb, et par conséquent mine d’argent, parce que l’un ne peut être sans l’autre. La batterie de monnaie tant d’or que d’argent qu’ils ont en icelle ville leur est fort profitable tant à cause des officiers qui sont en icelle monnaie, qu’aussi à cause des mines d’argent qui sont audit pays, même que ceux qui tirent quelque argent desdites mines sont tenus de le porter à monnaie pour être mis en oeuvre.

Chaudrons et cuirs

Grand trafic de peaux blanches qu’ils portent à Lyon. Trafic de cuivres et métaux, ils pourvoient toute la Guyenne de chaudrons et rouzete. Se fait aussi autre négociation de blancherie, qui est négociations de peaux de brebis et moutons et autres peaux dont on fait collets, gants, aiguillettes et infinie autre chose servant à l’usage de l’homme, de laquelle il advient grand profit.

Grand traffic de cuirs pour transporter aux pays étrangers, tellement que ce pays d’Auvergne ne fournit audit lieu desdites peaux et cuirs… Commodité des martinets et fontes des cuivres et métaux qu’ils ont près d’icelle ville, au moyen desquel lesdits marchands font grande quantité de chaudières et de chaudrons, poêles, poêlons et tous autres ustensiles cuivre et pareillement d’autres métaux desquels ils font apporter en ladite ville et de là les vendent aux marchands étrangers qui les viennent quérir, tellement qu’ils en fournissent toute la Guyenne et pays circumvoisins, parce qu’il n’a point de mémoire qu’il y ait autres martinets audit pays sinon en celui de Rouergue.

L’église collégiale et les implantations religieuses

Y a église collégiale, chanoines, le revenu vaut 3 à 4 000 livres. Un couvent de chartreux du revenu de 500 livres. Autres beaux couvents de religieuses ayant grand revenu aux environs de Villefranche. Jusques aux limites de Quercy y a plusieurs bénéfices de la valeur de 8 000 livres. Douze chanoines.

Partant de Villefranche et allant à Haute Marche sur les frontières de Givauda et Auvergne le pays est monteux, toutefois est commode car y a de bonnes terres portant froment et tous autres grains. »

Source : Vilafranca, Christian-Pierre Bedel

Pour en savoir plus :

Société des Amis de Villefranche et du Bas-Rouergue
amisvbr {@} gmail.com
www.amis-villefranche.fr
09 67 56 70 10
Permanences le mercredi de 15h00 à 17h00 à la Maison des Sociétés, place Bernard-Lhez

Voir aussi les Archives municipales

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